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LA MAISON DE BARBERINE

La première auberge de Vallorcine

25 Juillet 2005 , Rédigé par Françoise et Charles Gardelle Publié dans #Histoire de Vallorcine

Une des gravures représentant la première auberge de notre petite vallée vient d'être acquise par le musée. Voici l'occasion de s'interroger sur les débuts du tourisme à Vallorcine. Il est impulsé par le voisinage de Chamonix, car Vallorcine est une des deux voies d'accès savoyardes vers le pays du Mont-Blanc.

Le tourisme commence au début du 18e siècle, époque où le public cultivé d'origine bourgeoise ou aristocratique s'éprend de la nature. Rousseau a été le chantre le plus célèbre de cette tendance. Les premiers arrivants connus furent les Anglais avec Windham et Pococke, montés à Chamonix durant l'été 1741. Par la suite, la clientèle resta longtemps britannique, mais pas seulement. Les Genevois tout proches accourent, notamment Bourrit et de Saussure. Bourrit est le premier à nous signaler avoir couché à Vallorcine, car la plupart des voyageurs s'efforcent d'accomplir d'une seule traite le parcours Martigny-Chamonix. On préfère généralement passer par le col de Balme plutôt que par notre vallée.

Bourrit a été hébergé par un Coutériard (habitant du Couteray). Les Coutériards sont les plus proches du sommet convoité: le Buet. Comment a-t-il été nourri et logé par l'habitant? Par d'autres voyageurs, nous savons que le vin monté de Martigny est toujours offert, ainsi que le riz au lait qui est pour le Vallorcin le plat des jours de fête ou des relevailles de la jeune accouchée. L'usage du riz s'explique par l'appartenance de la Savoie au royaume de Piémont, pays producteur. Il est à peu près certain que l'on cède au voyageur aisé le chambron ou le pêle afin qu'il y passe la nuit. Si Bourrit avait couché dans le foin, il nous l'aurait écrit.

Mais en pays catholique, il est une tradition bien connue: à défaut d'hôtel, le voyageur frappe à la cure. Ainsi furent logés au Breuil (Val d'Aoste) les premiers alpinistes qui tentèrent le Cervin. Il en est de même à Vallorcine où les touristes les plus nombreux au presbytère furent les officiers espagnols (janvier 1743-janvier 1749), puis français sous la Terreur (1793-1794) et à nouveau lors de la défaite napoléonienne (décembre 1813). Les officiers révolutionnaires furent de véritables pillards qui brisèrent le fourneau de pierre; les officiers de Napoléon, eux, payèrent.

Après 1815, le retour à la paix permet un certain essor du tourisme. Mais l'absence d'un véritable chemin en Valais entre la frontière et Trient limite le passage par Vallorcine et fait préférer, après la fonte des neiges, l'itinéraire moins dangereux de Balme.

Aussi il n'est pas encore question de bâtir un hôtel. Les Semblanet, une des familles les plus entreprenantes, se contentent d'ouvrir une première auberge dans leur maison. Ils ont bâti une forge au bord du torrent et exercent déjà le commerce avec des mulets (les seuls de Vallorcine). Leur demeure du Siseray est particulièrement bien placée, au bord de la route; les voyageurs venus du Valais viennent de grimper la rude côte montant de la frontière à l'église.

A coup sûr, l'auberge Semblanet fonctionne en 1821 lors du passage d'Ebel. En 1832, "les étrangers" y sont reçus fort amicalement, mais il leur faut se contenter de riz, de laitage et d'une sorte de gâteau. S'il est nécessaire de coucher, il faut demander l'hospitalité à la cure.

Le premier hôtel ne sera construit qu'en 1852 à Barberine (voir photo p. 13) par la commune, grâce à une "manoeuvre" de tous les habitants. Il périclitera, rapidement concurrencé par les hôtels de Tête Noire, de Trient, du col de la Forclaz, souvent tenus par les Argenteraux, qui sont déjà en conflit avec les Vallorcins à propos des pâturages. Il faudra attendre l'arrivée du train (1908) pour que Vallorcine possède tout un équipement hôtelier.

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